Le diable est dans les détails quand il s’agit de « Lucifer’s Hammer », le démon épique évoqué par Scott Porges d’American Motorcycle Service. Le constructeur originaire de Framingham au Massachusetts n’est pas étranger à la construction de motos incroyables; il en construit depuis son tout jeune âge. Après de nombreuses créations fantastiques couvrant un vaste éventail de marques, années, styles, modèles et performances, nous nous sommes assis avec Scott pour parler du chemin qui l’a amené à construire « The Hammer ».
Quel a été votre point de départ dans le domaine de la construction de motos?
J’ai commencé à faire des courses de motocross à l’âge de neuf ans, et mon père pilotait des motos et des voitures d’accélération. À une certaine époque vous pouviez obtenir votre permis à l’âge de 16 ans au Massachusetts, alors à l’âge de 15 ans je me suis procuré une Honda 450 et j’y ai mis un guidon Clubman et un tuyau d’échappement. Je l’ai peinturée en bleu métallisé, j’ai obtenu mon permis, et puis boum! J’étais sur la route. Au cours de la première semaine, j’ai tout frappé, sauf un coup de circuit. J’ai frappé un autobus, j’ai frappé une voiture, j’ai frappé un trottoir. Toutes ces années de motocross ne m’avaient pas du tout aidé sur la rue!
Alors comment vos débuts se sont-ils passés dans le monde de la construction de motos?
Je travaillais à la concession Honda de mes oncles dans les années 70, et j’y ai été certifié par Honda. J’avais une Super Sport 78 que j’avais construite, une 76 que j’ai intégrée dans un cadre custom que j’avais fait. Au début, à l’âge d’environ 16 ans, j’ai eu une Honda 550 que j’avais construite sur un cadre rigide. C’était une moto de style Digger, avec un réservoir en forme de diamant et une petite selle présentant un motif de losanges. À l’époque c’est ce qui était populaire : longue et basse, mince et étroite. J’ai ensuite construit une Digger 750, puis une Digger Kawasaki 900 quand j’avais 18 ans. Après l’avoir conduite pendant environ six mois, je l’ai vendue et je me suis acheté une Harley. Et j’ai eu la piqûre. Ma première Harley était une Super Glide 76.
Je crois qu’à partir de là ça a fait boule de neige…
Oui, j’ai ensuite eu une Super Glide 78 et je suis allé en ville. J’ai gardé le bras oscillant du cadre de série. J’ai rasé et abaissé le réservoir, j’ai construit un moteur « stroker » et je suis passé de 74 po3à 88 po3. J’ai mis des flammes spectrales et une grille-écran sur tous les panneaux. J’ai gagné un tas de prix aux expositions avec la moto, et elle réalisait une performance d’environ 11 secondes en 1981-1983. Je construis des motocyclettes custom depuis ce temps-là. Nous avions une Top Fuel dans les années 80 qui se classait dans les trois meilleures à l’époque. J’étais le gars de réglages et de moteurs.
Vous ne semblez pas vous en tenir à un type ou une marque de moto. Vous avez vraiment des goûts et des styles variés.
Je m’intéresse à tout. Je construis des modèles personnalisés de V-Rod, de choppers, de motos à gros pneus, de motos sportives, etc. Il y a quelques années, j’ai eu un faible pour la construction de « scramblers » avec des moteurs Shovelhead et des cadres Soft tail, des pneus hors routes 60/40, des guidons de motocross, des maîtres-cylindres Honda, des tuyaux « high pipes ». J’en ai fait pendant un certain temps, puis je me suis intéressé aux Café Racer et je me suis mis à en construire. Je passe à autre chose dès que je trouve un créneau. Si ou quand je m’ennuie, je vais au suivant.
Lucifer’s Hammer est toute une moto. Quelle est l’histoire derrière cette construction magnifique?
J’ai eu cette moto en tête pendant environ cinq ans et demi. Il s’agit du bien et du mal, et ça cadre tout de même bien avec notre époque. Je lis beaucoup. Des trucs religieux, toutes sortes de choses. Toute l’affaire était plutôt en développement. À l’occasion, mon ami Rob Lopez et moi construisons des motos ensemble. Nous avons construit cinq ou six motos au moment où la folie du « build off » se déroulait, et nous les avons exposées. Il m’a appelé il y a cinq ou six ans et m’a dit : « nous devrions construire une autre moto, ça fait longtemps ». J’avais déjà l’idée! C’était ça, nous avons commencé. Alors je suis allé en ligne et j’ai fait quelques recherches. Je voulais que tout le projet soit à propos de Satan et des archanges. J’ai donc trouvé quelques ouvrages artistiques très cool en ligne, puis j’ai commencé à chercher des graveurs. Mon père a été pendant longtemps un marchand d’armes à feu, et il avait travaillé avec des graveurs pour certaines de ses armes. J’ai parlé à Paul Cox et je lui ai demandé qui avait fait les gravures pour la moto qu’il avait construite pour Brad Pitt. Il m’a recommandé Heather New (New Line Engraving). Je suis allé sur son site Internet et j’ai regardé son travail, bingo! J’ai réussi à la joindre, je lui ai envoyé l’ouvrage artistique, et nous avons parlé de quelqu’un qui pourrait créer quelque chose dans ce style. Je lui ai parlé de mon concept et elle est partie de cette idée (liberté artistique). C’est à peu près comme ça que c’est arrivé.
Toute l’histoire de cette moto tourne autour du bien et du mal. C’est simple, mais complexe à la fois. La moto est à propos du yin et du yang de la vie. Tout a été laissé au naturel. De l’aluminium fini au naturel. Du nickel non chromé. Un minimum de peinture. Je l’ai peinturée argenté, sans ouvrage artistique. Il n’y a que trois parties peintes : le cadre, le réservoir d’huile et le garde-boue. Je voulais qu’elle soit très organique, simple mais intense.
Alors je me suis procuré un moteur 103CI S&S. J’avais déjà une transmission. J’ai acheté un cadre Paughco que j’ai coupé et modifié. J’avais un tas de pièces qui traînaient. Scott de Invader wheels s’est occupé des roues des années 60 et 70 (originales et non des reproductions). Il m’a fallu presque un an pour les obtenir, mais c’est ce que je voulais. L’avantage (de travailler) avec Heather c’est que je n’ai eu à créer ou obtenir que peu de pièces. Je lui envoyais de petits lots à fabriquer. Six pièces lui prenaient de deux à trois mois à faire, ce qui n’était pas un problème parce que je savais que ce serait très long avant d’obtenir les roues. Au fur et à mesure, j’ai dessiné toutes les petites queues de diablotin sur la moto, les guidons, les pièces et les petits morceaux. J’ai travaillé le bas des jambes sur le tour et je les ai fait ressembler aux piliers de l’enfer. Et, bien sûr, plus vous en faites et plus vous en ajoutez, alors le concept a changé et s’est développé en cours de route.
Après avoir travaillé deux ans et demi à préparer toutes les pièces avec Heather, je me suis retiré dans mon coin afin d’assembler la moto et j’ai passé une semaine à y dévouer toute mon attention. À mesure que vous la voyez prendre forme, vous vous dites « Wooow ».
Alors j’imagine qu’au cours des prochaines années nous verrons une autre moto de rêve?
Je pense bien!
Le temps, le travail acharné et la vision ont représenté les débuts de cette moto, mais la Hammer symbolise autre chose, un hommage à l’ultime combat. La partenaire de la sœur de Scott a gravé la selle, et elle a choisi de dessiner l’archange tenant une épée pointant vers le bas. Par un étrange coup du sort, Heather a gravé une même image, mais opposée et également orientée vers l’intérieur sans qu’il n’y ait de communication entre les artistes. De l’éther cette créature se réveilla, et maintenant la Hammer est ici pour être contemplée par tous. La moto sera présentée en mai 2018 au Roll the Bones Show à Montréal.